« Cet appel intérieur chez l’homme qui ne remet à personne la charge de son destin ». Cette citation de Jean-Clarence Lambert en exergue du poème du jour résonne en moi comme un appel. Celui de la poésie. Art ou organisme à multiple facette, la poésie offre à l’homme la possibilité de se prendre en main. Non pas comme l’imbécile qui clame sa vérité révélée à base de douche froide et de compléments alimentaires.

Plutôt comme une simple invitation à être soi même. Dépouillé de l’ego. Surprenamment vivant en lien avec soi et les autres. Une solution proposée pour être en société en restant soi-même.

Il y a d’autant plus d’émotions que le chant du jour nous est étranger dans son temps et sa géographie. Pourtant l’être humain est là, présent dans son interrogation sublime : vivre.

J'ai bu du vin de champignon; pleure mon coeur, ô malheureux

Je ne connais sur terre que souffrance,

je ne connais pas de plaisir, je ne suis pas heureux,

je ne connais sur terre que souffrance.

Haineusement je vois la mort. Que puis-je faire ?

Rien ! Je suis triste et sans recours.

Qu'importe si nous sommes ces précieusses pierres

l'une avec l'autre sur un fil,

si nous sommes les gemmes d'un même collier !

Cela n'est rien ! Triste je suis et sans recours.

Ami, ô mon ami, mon ami véritable,

sa parole seule nous est amour,

et je me la rappelle : car sans comprendre

nous allons cesser d'être !

Or ici sont nos fleurs...

Que votre cœur n'en soit dolent,

Vous tous, ô mes amis !

Vous le savez et je le sais :

notre vie passe en une fois,

en un seul jour, en une nuit, c'est le dépouillement

nous ne sommes venus que pour nous rencontrer.

et sur terre la vie n'est qu'un prêt.

La poésie Mexicaine, éditions Seghers, 1961

L’anecdote te permet d’aller plus loin, mais pas plus que les pieds du poète qui chausse du 41.

• Pierre Seghers (1906 - 1987) — oui, aujourd’hui on va parler de l’éditeur, j’avais peur d’écrire des bêtises sur le poète, aussi anonyme qu’aztèque — donc Pierre Seghers, éditeur de cette anthologie « Les poésies mexicaines » est l'homme des poètes de l’après - guerre. A noter qu’il commence sa carrière comme saute-ruisseau (clerc de notaire débutant) avant de poursuivre en surnuméraire dans l’administration du Cadastre. Toute fonction aussi honorable que celle de poète. (Il n'y a pas de sot métier)

• Voyageur de commerce par la suite, il monte dans les années 30, un magasin de fournitures de cafés (fauteuil, banquette, zinc, etc.) à Avignon. À cette époque il fréquente Mon bar avec Bernard Grasset (l’éditeur). La légende voudrait qu’il se soit assis à la même table qu’Elsa Triolet et Louis Aragon. (les voyageurs du commerce de l’amour)

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