Là où il y a la volonté, il y a un chemin. Cette citation apocryphe, attribuée à toute une multitude de personnages historiques, principalement Lénine, mais aussi Winston Churchill ou même Luther — Wo es eine Wille gibt, gibt es ein Weg — fleure bon le bonhomme et le dessous de bras poilu.
Ça décide, Ça avance dans la vie, en bien ou en mal d’ailleurs, mais Ça maîtrise son destin. Ça pu comme une aisselle à 18 heures entre Pont de Saint — Cloud et Mairie de Clichy. Odeur univoque baignant encore dans les effluves des années quatre-vingt-dix : boisées, muscs ou membrées.
On nous a mis dans le métro. La poésie nous en sort ; pas parce qu’elle est belle, non parce qu’elle parle de soi. Soi dans la neige ou dans l’adversité, soit dans le désir ou le regret. La poésie nous creuse dans l’instant présent, fût-ce six siècles auparavant.
(Et j’en ai toujours le désir, Et il ne date pas d’hier)
Ici, elle raconte comment elle n'a récolté que des résidus de l'héritage de son père
Mon père que j'ai mentionné
Ici, avait l'ardent désir
Et le ferme dessein d'avoir
Un fils mâle pour qu'il hérite
Et jouisse de ses richesses
Que les cadeaux n'entament pas,
Comme il disait, je me souviens.
Lui et la mère m'engendrèrent
D'un commun accord dans ce but,
Mais il manqua son objectif
Car ma mère, qui était bien
Plus puissante, voulait avoir
Une femelle à son image.
Et je naquis fille, c'est vrai ;
Mais ma mère fit tant pour lui
Que je ressemblais en tous points
Entièrement à mon père,
À la seule exception du sexe,
Mais dans mes gestes et mimiques,
Si bien que vous auriez pensé,
À propos de nos caractères,
Qu'ils étaient tout identiques.
Je reçus un prénom de fille
Et fus élevée avec soin
Et enthousiasme par ma mère,
Qui m'aimait et chérissait tant
Qu'elle m'allaita elle-même
Dès qu'elle m'eut donné naissance,
Veilla très bien sur mon enfance
Et favorisa ma croissance.
Alors je n'avais d'autre but
Et pas d'autre nécessité
Que de jouer, suivant l'usage,
Avec les enfants de mon âge.
Mais comme j'étais née fille,
Il n'était pas considéré
Que je puisse en rien hériter
De mon père, et je ne pus pas
Jouir des richesses qu'il puisa
Dans la fontaine somptueuse,
Par Coutume plus que par droit
Si le droit régnait, la femelle
N'y perdrait pas plus que le fils.
Mais en bien des lieux, la coutume
Gagne sur le droit, je le sais.
Pour cette raison, en tous lieux,
Je n'ai, faute d'éducation,
Pu puiser dans ce grand trésor ;
Cette coutume est consternante !
Car autrement, je le crois bien,
J'aurais été riche et comblée
Par le trésor de la fontaine,
Car j'avais bien la volonté
(Et j'en ai toujours le désir,
Et il ne date pas d'hier)
D'y puiser jusques au tréfonds.
C'est mon désir le plus profond,
Mais rien n'y vaut, c'est impossible
En raison de cette coutume,
Que Dieu la maudisse à jamais !
Je suis comme les amoureux
Ardents et brûlants de désir
Qui ne peuvent voir ni entendre
Ce dont ils voudraient jouir.
En tout cela, je leur ressemble,
Car je veux ce que je n'ai pas :
C'est le trésor que le savoir
Donne à tous ceux qui le révèrent.
Et même si j'étais femelle
Et ne pouvais en hériter,
J'y tendais naturellement
Du fait de mes dispositions.
Ma ressemblance avec mon père
Me poussa même à chaparder
Des résidus et des paillettes,
Des centimes et des piécettes
Tombés de l'immense trésor
Qui les contenait par milliers.
Et bien que j'en aie amassé
Trop peu pour mon avidité,
Tout ce que j'ai, je l'ai volé,
Et c'est une très maigre épargne :
Cela se voit à mon travail.
Pourtant ce que j'en ai gardé
M'est toujours d'un profit immense.
Rien d'autre n'est vraiment à moi :
Malgré les pertes infligées
Par Fortune, la fourbe abjecte,
Cela au moins, je l'ai gardé
Et jusqu'à ma mort, j'en jouirai.
Christine de Pisan,Le livre de mutacion de fortune in Écrire d'amour Parler de soi, Le livre de poche, édition et traduction Sarah Delale & Lucien Dugaz
Anecdotes & Broutilles
L’anecdote te permet d’aller plus loin, mais pas plus que les pieds du poète qui chausse du 41.
Christine de Pisan (1364 - 1430) perd son père à 80 ans, puis son mari de la peste. Elle se retrouve avec sa mère sa nièce, ses trois enfants à charge. Pour vivre, elle choisit la poésie, six siècles plus tard sa poésie nous choisit pour vivre. (transmutation)
La fortune dont parle Christine est cette roue qui tourne (hoho quel hasard) mettant plus bas que terre un seigneur, aujourd’hui et plus haut que ciel un paysan demain. Nul ne s’y fie. Prosaïque Christine en reconnaît l’existence sans pour autant en faire une loi. En reine, elle règne sur va vie. (gouvernante)
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