thibaux
La faiblesse est une fleur étonnante. Elle pousse partout dans notre jardin, sur le balcon de notre cuisine pour les plus urbains où enfouie sous le sable des marées basses. Souvent on l’oppose à la force, mais la faiblesse n’est pas bête, elle n’oppose à rien : elle s’évanouit.
Elle tombe dans les pommes. Le ver est dans le fruit, encore il mange la pomme et la faiblesse tombe plus bas. « Badatra » : la faiblesse, c’est cassée la gueule.
Elle ne se relève pas — non ; elle se refait une beauté, un amour, une immensité, un horizon à la force tranquille de ne pas en avoir, de ne pas en vouloir.
La faiblesse s’oublie, petite dame polie qui préfère la vie à l’existence.
(image : intelligence artificielle / Leonardo.AI)
Je t'aime d'être faible et câline en mes bras
Et de chercher le sûr refuge de mes bras
Ainsi qu'un berceau tiède où tu reposeras.
Je t'aime d'être rousse et pareille à l'automne,
Frêle image de la Déesse de l'automne
Que le soleil couchant illumine et couronne.
Je t'aime d'être lente et de marcher sans bruit
Et de parler très bas et de haïr le bruit,
Comme l'on fait dans la présence de la nuit.
Et je t'aime surtout d'être pâle et mourante,
Et de gémir avec des sanglots de mourante,
Dans le cruel plaisir qui s'acharne et tourmente.
Je t'aime d'être, ô soeur des reines de jadis,
Exilée au milieu des splendeurs de jadis,
Plus blanche qu'un reflet de lune sur un lys...
Je t'aime de ne point t'émouvoir, lorsque blême
Et tremblante je ne puis cacher mon front blême,
Ô toi qui ne sauras jamais combien je t'aime !
Renée VIVIEN in À l’heure des mains jointes (1906), Hachette / BNF
L’anecdote te permet d’aller plus loin, mais pas plus que les pieds du poète qui chausse du 41.
Renée VIVIEN (1877 - 1909) — raconte la légende — se laissa mourir de faim à 36 ans par amour ; sans doute est-ce partiellement faux. Sans doute mourut-elle aussi par manque d’amour de ses contemporains qui transformèrent son homosexualité assumée en débauche. (Là où est le doux, ton penchant concupiscent pour la violence et la force verra le mal)
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