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#POGD 100 Don Juan sur la vague

Une poésie par semaine dans ta boite mail

Rien n’empêche d’imaginer, Charles Baudelaire en combinaison de néoprène, une planche de surf sous le bras, l’eau à mi-cuisse, baie des Trépassés ou pointe de la Torche (Finistère sud). Plus difficile de visualiser Paul Verlaine dans la même situation, l’homme était de notoriété moins sportif. Enfin, rien n’est impossible, non plus.

En revanche, on sait de source sûre que Don Juan, mort, passa les vagues du fleuve Styx sur une planche de surf, laissant derrière lui, les regards de haines et les supplications de toutes celles qu’il avait trompées et de tout ceux qu’il avait déçus.

Tant d’attentes trompées, mais fallait-il attendre quelque chose de Don Juan ?

L’océan a noyé cette question comme le poisson depuis longtemps. Il nous reste un poème, journal de bord d’une session de surf aussi unique qu’exceptionnelle.

(Illustration : collaboration Parley / Rosemarie Trockel, “Albatros”, 2019. 6'0'' x 20 1⁄2’’ x 2 1⁄2’’, Fiberglass print on laminated Paulownia wood. Edition 20 + 8 AP)


Don Juan aux enfers

Quand Don Juan descendit vers l'onde souterraine
Et lorsqu'il eut donné son obole à Charon,
Un sombre mendiant, l'oeil fier comme Antisthène,
D'un bras vengeur et fort saisit chaque aviron.

Montrant leurs seins pendants et leurs robes ouvertes,
Des femmes se tordaient sous le noir firmament,
Et, comme un grand troupeau de victimes offertes,
Derrière lui traînaient un long mugissement.

Sganarelle en riant lui réclamait ses gages,
Tandis que Don Luis avec un doigt tremblant
Montrait à tous les morts errant sur les rivages
Le fils audacieux qui railla son front blanc.

Frissonnant sous son deuil, la chaste et maigre Elvire,
Près de l'époux perfide et qui fut son amant,
Semblait lui réclamer un suprême sourire
Où brillât la douceur de son premier serment.

Tout droit dans son armure, un grand homme de pierre
Se tenait à la barre et coupait le flot noir,
Mais le calme héros, courbé sur sa rapière,
Regardait le sillage et ne daignait rien voir.

Charles Baudelaire, Les fleurs du mal , Poésie / Gallimard

Anecdotes et broutilles

L’anecdote te permet d’aller plus loin, mais pas plus que les pieds du poète qui chausse du 41.

  • À 18 ans, Charles Baudelaire (1821 - 1867) ne voulait pas réussir sa vie, Il aimait se promener nu-tête et grignoter des frites à pleins cornets. (Deux siècles plus tard, il reste l’une des « Grosses huiles » de la poésie les plus respectés)

  • Une actrice invita chez elle le poète pour souper. Une fois sur place, Charles Baudelaire découvrit les Fleurs du mal dans son boudoir. Intrigué, il lui demanda si elle l’avait lu. « Pas encore, mais on m’a promis qu’il est très cochon » répondit-elle. Furieux le poète quitta les lieux. (Pourtant dans le cochon tout est bon)

Tu peux m'écrire en répondant à ce mail ou me faire un vocal pour me demander un poème ou une dédicace. À la semaine prochaine.

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