La poésie peut être aussi belle que le poète est bête quand l’homme se laisse aller aux atermoiements de sa sensibilité.
Effrayé de ses pouvoirs de voyant, il recule face au paysage de la vie. Plaines et vallons sont sous ses yeux, et lui refuse de les nommer.
Il préfère chanter la douleur et le déchirement. Dans un poème à six francs et six sous, qu’il appellera l’amour de la semaine.
Si vous croyez que je vais dire
Qui j'ose aimer,
Je ne saurais, pour un empire,
Vous la nommer.
Nous allons chanter à la ronde,
Si vous voulez,
Que je l'adore et qu'elle est blonde
Comme les blés.
Je fais ce que sa fantaisie
Veut m'ordonner,
Et je puis, s'il lui faut ma vie,
La lui donner.
Du mal qu'une amour ignorée
Nous fait souffrir,
J'en porte l'âme déchirée
Jusqu'à mourir.
Mais j'aime trop pour que je die
Qui j'ose aimer,
Et je veux mourir pour ma mie
Sans la nommer.
Alfred de Musset, Poèmes choisis, Le livre de poche jeunesse
L’anecdote te permet d’aller plus loin, mais pas plus que les pieds du poète qui chausse du 41.
Alfred de Musset (1810 - 1857) emporta les faveurs de George Sand face à Victor Hugo. L’écrivaine avait promis qu’elle se donnerait à celui qui lui écrirait le poème le plus obscène, c’est Alfred qui remporta la compétition avec les Filles de Loch. (Hugo perd)
Son frère Paul de Musset épousa l’une des maîtresses du poète, Aimée d’Alton. Le couple vécut heureux jusqu’à la fin. Paul et Aimée sont enterrés côte à côte, leur sépulture est à cent mètres de celle du poète. (Mieux vaut pierre tombale, que pieuse et belle morale)
Tu peux m'écrire en répondant à ce mail ou me faire un vocal pour me demander un poème ou une dédicace. À la semaine prochaine.
thibaux
