Et si l’éternité était un faux semblant ? Et si nous n’avions pas le temps de vivre. Personnellement, je reste depuis toujours obsédé par ce fragment de vers de Tristan Corbière « — C’est la fin. Quelqu’un chante. — ». La fin, la faim : quand l’appétit de vivre arrive trop tard.
En vérité (mettez des guillemets à ce dernier mot, toujours quand il est dit sur un mode déclamatoire), donc en vérité, l’éternité existe que parce qu’il y a répétition : dans le quotidien, les actes, les histoires que l’on raconte pour se vivre.
Dans les faits, c’est la fin qui gagne. Berceau heureux des désillusions qui oblige toutes les naissances à l’instant présent.
(Si la mer n’avait pas de vagues pour l’arracher et
la rendre à la mer ; si la mer avait trop de vagues
mais pas assez þour envahir l’horizon ; suffisamment
— mais juste à peine — pour inquiéter la terre ;
si la mer n’avait pas d’oreilles pour entendre la
mer, n’avait pas d’yeux pour être à jamais le regard
de la mer ; si la mer n’avait pas de sel ni d’écume, elle
serait la mer grise de la mort au milieu du soleil coupé
de ses racines, elle serait la mer moribonde au milieu
des branches coupées du soleil, elle serait la mer minée
dont l’explosion menace le monde dans sa mémoire
d'éléphant. Mais les fruits. Que deviendraient les
fruits ? Mais les hommes. Que deviendraient les
hommes ?
Edmond Jabès, Le Livre des Questions, L'imaginaire Gallimard
L'anecdote te permet d'aller plus loin, mais pas plus que les pieds du poète qui chausse du 41.
Edmond Jabès (1912 - 1991) est l’ami de la poétesse Andrée Chedid, grand-mère du chanteur M. (Le fruit ne tombe jamais très loin de l’arbre)
Juif égyptien francophone, il est contraint de quitter l’Égypte en 1957, il emporte avec lui la mémoire de la mort de sœur à 12 ans. (La mort est un maigre bagage)
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thibaux